« La tribu prophétique aux prunelles ardentes, Hier s’était mise en route, emportant ses petits Sur son dos, ou livrant à leurs fiers appétits, Le trésor toujours prêt des mamelles pendantes. » Bon, je vais faire le rabat-joie, un rien briseur de rêves mais la vérité si je mens, j’ai vécu parmi les Gens du Voyage et ce monde, y’a pas à dire, il est « espécial ». Mes transhumances m’amenèrent souvent aux portes de vos villes, dans des lieux sans âmes, entre échangeurs de voies et zones commerciales. Dans ces banlieues aguichantes entièrement destinées à recueillir le fruit de votre mois de boulot, tout est fait pour vous prendre en main et vous guider vers le but final : dépenser votre argent. Les panneaux publicitaires sont hauts et vous crient : « Que je t’aime, que je t’aime, que je t’aime quand ta paye est tombée et que ton frigo est vide, viens vite chez Casino te remplir le bide… ». Mais à bien regarder, ces antichambres du surendettement, destinées à racketter le ménage moyen français, dès le soir venu, changement de décor. Les parkings se sont vidés, des hommes « en noir » accompagnés de chiens muselés, font la ronde autour de ces tirelires géantes, miroirs aux alouettes. Derrière la jardinerie et le bricolage pour tous, à l’abri du regard des consomme-acteurs, là où le tapis de bitume s’arrête « car plus rien ne le pousse à vous amener plus loin », se dégage une petite fumée de feu de bois. Bien dissimulées derrière les taillis, au milieu de vieux caddies de supermarché et près d’une carcasse de voiture couleur rouille, peinent à exister trois caravanes. De la fenêtre arrière, attachée à la poignée permettant de la manipuler à la main, part une corde sur laquelle s’exhibent quelques vêtements de couleur criarde. Comme un fil d’Ariane, cette ligne Siegfried vous mènera au coin des toilettes. Il est repérable aisément, aux guirlandes de papiers rose et blanc, accrochées aux épines des buissons, et que le vent invite à se trémousser. Le visiteur lambda détourne les yeux de dégoût, ..Pouha ! Comment peut on laisser « ces gents là », polluer ce si bel espace . Un jour je vous raconterai, si vous l’acceptez, le langage secret des Gens du Voyage. Qu’ils soient vêtements accrochés aux branches, cailloux disposés sur le bord de la route, gerbes d’herbes séchées, vous serez surpris par « le Patrin ». Le décor est planté pour quelques jours, le temps à la Gendarmerie locale de demander à ces nomades de déguerpir. Partir, c’est leur vie, oui, mais il y a des fois où… Pour le week-end, c’est pause, les Schmitt sont venus, conciliants, demandant à cette famille de nomades de rester tranquille, de ne pas aller importuner les clients des supermarchés, car pour les commerçants, c’est difficile… La crise… Dure la vie. Les trois hommes de la famille vont et viennent à longueur de journée, ramassant de la ferraille, dérangeant les riverains pour tailler les arbres, repeindre un muret « qui de toute façon ne sera pas plus moche après leur passage ». Les femmes, celles qui n’ont pas la garde des « enfants des autres »… Et oui, chacune leur tour de garde, vont « bricoler » pour ramener un peu d’argent, de quoi faire bouillir la marmite. Il y a bien quelques fois des embrouilles entre elles, ou avec des gadgés, mais en règle générale, leurs relations sont au beau fixe… Il y va de l’intérêt général de la famille. Mais en ce samedi soir, il y a un « mangement » de prévu et là, ce que je vais vous raconter c’est du vécu. Nombreux sont les lecteurs qui me demandent de prouver mes écrits par des photos. Et vous, avez-vous pris des photos lorsque vous alliez chercher votre plein, faire le plein du réservoir ? PREMIÈRE PARTIE… . ©Philippe X – 04/02/2020
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