Petite fable affable, Cycle pyrénéen
Un ours qui ne se mouvait qu’à la voile
Mise au vent virant de sa vanité,
Avait régné, les yeux pleins d’étoiles,
En des temps surannés, ébruités
Par les plus replets des livres d’Histoire,
Qui recensent aussi bien l’accessoire
Que l’essentiel des fléaux subis
Par nos contrées connues pour leurs lubies.
Malengroin et malcontent au possible,
Ce souverain qui pâtissait de maux
Divers même l’été, voyait la cible
Parfaite chez bêtes et animaux
Passant, par malheur, auprès de sa patte.
Mieux, friponnerie, truanderies
Et camouflets, pour ce lourd psychopathe
Étaient communs sous sa commanderie.
Herculéen et rebutant, farouche
Aussi, ce triste Sire bannissait
Compassion et bonté, faisant mouche
Du croc, la griffe tirée à l’excès.
Il n’était que chamailleries et grogne,
Violence envers faibles et petits,
Intolérance pour les autres : pogne
D’acier d’un gant de fort fer sortie !
Tenant à honneur de manger trop parce
Que ses manants ne mangeaient pas assez,
Il se goinfrait que c’aurait été farce
Si tant de ses sujets n’en trépassaient
Pas pour l’heur !… Et puis, sans que l’on sache
Pourquoi, un beau jour, il disparut : caches
Et trônes il avait vidés. L’homme eut-il
Raison de ce gros baron sans tortil ?
Qu’importe !… On fêta la bonne nouvelle
Et la neuve liberté qu’elle supposait.
La peur partie portait toute cervelle
À ébullition : lors, on osait
Sortir, courir, jaser par les estives
Et les gaves. Insouciance et joies
Étaient devenues communicatives :
On mouchait Cassandres et rabat-joies !
Le plaisir anesthésiait les sages.
La fin du bonheur semblait incongrue :
On vivait, désormais, dans un autre âge…
Et puis, un matin, notre ours reparut.
Méfions-nous de ces bêtes immondes
Que l’on croit mortes voire disparues
Et qui ne sont, hélas, en ce bas-monde,
Qu’assoupies… lors prêtes à hanter nos rues !
© Christian Satgé – avril 2019
Obsédé textuel & rimeur solidaire, (af)fabuliste à césure… voire plus tard, je rêve de donner du sens aux sons comme des sons aux sens. « Méchant écriveur de lignes inégales », je stance, en effet et pour toute cause, à tout propos, essayant de trouver un équilibre entre "le beau", "le bon" et "le bien", en attendant la cata'strophe finale. Plus "humeuriste" qu'humoriste, pas vraiment poétiquement correct, j'ai vu le jour dans la « ville rosse » deux ans avant que Cl. Nougaro ne l'(en)chante. Après avoir roulé ma bosse plus que carrosse, je vis caché dans ce muscle frontalier de bien des lieux que l'on nomme Pyrénées où l'on ne trouve pire aîné que montagnard.
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Binjour Christian ravie de vous lire ce matin, merci pour ce magnifique et profond texte portant un message enrichissant
Agréable journée
Mes amitiés
Fattoum.
Merci, cher ami, pour le partage de cette pure merveille ! Cette race, hélas est bien tenace ; ce serait un miracle qu’elle s’efface ! J’aime beaucoup le poème chanté de Lotfi Bouchnak, intitulé :”je suis citoyen”, dans lequel il dit : “Prenez les acquis, prenez vos fauteuils, mais laissez la patrie” !