Rue des Bernardins – Christian Satgé

Petite fable affable

Rue des bons Frères Bernardins,
Un laideron et un blondin,
Devant une porte cochère,
Dans la lueur d’un réverbère,
Se mangeaient à plein le bisou,
Se faisant des gazous-grisous
Comme seul fait un véritable
Couple qui va passer à table.

 

Les petites sœurs du cœur
De ce coin, toute en rancœur,
Quoique femmes qu’on dit « publiques »
Se font filles bien pudiques,
Leurs Amours fuyant le jour,
Ignorant les non, les toujours,…
Elles moquent cette coquette
Et morguent l’autre, slip aux sockettes,
Qui agissaient, si mal cachés,
Tout comme s’ils étaient couchés.
Volage, légère, galante,
Coquette mais pas inconstante,
La coquine mène le bal.
Rien entre eux n’était verbal.

 

Car elle est déchaînée, l’amante,
Et se sent l’âme d’une mante
Qu’importe la vaine rumeur,
Ell’ veut que se mêlent leurs humeurs.
Les filles sifflent et, facile,
Réveillent les vieux fossiles
De ce quartier à demi
Réveillés… ou, las, endormis.

 

Yeux et fenêtres s’allument
Et les regards fouillent la brume…
C’est vu !… On crie à la catin
Décatie, hurle à la putain !
Les amants fuient. On alerte
Le mari marri de sa perte…
De cancans mesquins en ragots
Compatissants chez les bigots
La rue sut vite l’infortune
De ce cocu cousu de tunes,
Puis la ville en a brui,
Avant que meure la nuit.
Si l’Amour, chez nous, est aveugle,
Les voisins pas… et le meuglent !

 

© Christian Satgé – septembre 2016

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Christian Satgé

Christian Satgé (834)

Obsédé textuel & rimeur solidaire, (af)fabuliste à césure… voire plus tard, je rêve de donner du sens aux sons comme des sons aux sens. « Méchant écriveur de lignes inégales », je stance, en effet et pour toute cause, à tout propos, essayant de trouver un équilibre entre "le beau", "le bon" et "le bien", en attendant la cata'strophe finale. Plus "humeuriste" qu'humoriste, pas vraiment poétiquement correct, j'ai vu le jour dans la « ville rosse » deux ans avant que Cl. Nougaro ne l'(en)chante. Après avoir roulé ma bosse plus que carrosse, je vis caché dans ce muscle frontalier de bien des lieux que l'on nomme Pyrénées où l'on ne trouve pire aîné que montagnard.

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3 Commentaires
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Anne Cailloux
Membre
23 février 2019 18 h 18 min

J’aime beaucoup et de plus c’est tellement vrai
c’est si bien dit, que l’on aimerai bien être couché avec vos mots.
Très beau et bien écrit, de l’art..
Anne

Invité
20 février 2019 13 h 25 min

Bonjour Christian j’ai adoré voici une petite prose bises !
Amante, mante religieuse aux regards tueur à leurs faux amours d’un soir sans pudeur, la nuit devient malicieuse, condamnant l’amour celui des troubadours, aux chants de leurs pleurs des sentiments enfuis dans les ténèbres insidieuses du plaisir feint dans la douleur de leur chair, à l’aube elle redeviennent femme en la souffrance de leur âme, la bohème d’une vie décousue