Réussir ? – Christian Satgé

Petite fable affable

Un censeur qui vivait comme un vrai pourceau,
Gras même dans ses rires qui sonnaient glas
Lanternait en tout, las, depuis son berceau.
Aussi gagnait-il moins sa vie, lourd et las,
Qu’à être connu, notre bon bécasseau.

Jusqu’au ce jour faste, où se fit la lumière
Dans son esprit quelque peu… oui…  engourdi…
Il ne savait pas, cette âme trop fière,
Qu’il en avait !… Le voilà qui pense et dit :
« Vais-je réussir ma vie ? » inquiétude
Légitime mais, chez lui, inespérée.

Il prend, aussitôt, la mauvaise habitude
De poser cette question aux curés
De tous les dieux qui, bien sûr, lui enjoignent
De rencontrer leur idole, en ses cieux,
Mais point d’ascenseur, pas d’escalier. Le bagne !
Il se tourna vers des penseurs moins pieux,
Les Philosophes, qui l’incitent au plus vite…
À se trouver lui-même. Et vu son tour
De taille il pensait, à cette cordiale invite,
Ne pouvoir se rater. Quoiqu’il passât des jours
Devant sa glace à se mirer, tout angoisse,
Elle refusa de réfléchir pour lui !

Nul ne semblait pouvoir répondre, la poisse !,
À sa lancinante question hors que lui.
Même pas cet homme de la Providence
Qui, dans la plus aveugle soumission
Et dans une fort mécanique cadence
Lui donnait confortable solution.

Un vieux paysan sans titre ni prestige
Lui affirme un jour : « On a réussi sa vie
Quand on n’a plus besoin de marcher, vertige,
Sur l’autre pour s’affirmer, que fuit l’envie
De le rabaisser pour exister. Tu piges ?! »

.

©Christian Satgé – 27/04/19

 

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Christian Satgé

Christian Satgé (834)

Obsédé textuel & rimeur solidaire, (af)fabuliste à césure… voire plus tard, je rêve de donner du sens aux sons comme des sons aux sens. « Méchant écriveur de lignes inégales », je stance, en effet et pour toute cause, à tout propos, essayant de trouver un équilibre entre "le beau", "le bon" et "le bien", en attendant la cata'strophe finale. Plus "humeuriste" qu'humoriste, pas vraiment poétiquement correct, j'ai vu le jour dans la « ville rosse » deux ans avant que Cl. Nougaro ne l'(en)chante. Après avoir roulé ma bosse plus que carrosse, je vis caché dans ce muscle frontalier de bien des lieux que l'on nomme Pyrénées où l'on ne trouve pire aîné que montagnard.

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Philippe X
Membre
4 mai 2019 3 h 45 min

Beau sujet , d’actualité en vérité,bien senti et bien expliqué..écraser pour monter sur la tête des autres.
Ton texte reflète bien “leur” monde…bravissimo ! ‘pour faire mieux que Anne …Plaf la voilà écrasée ! )
Bonne journée ou l”amitié sera sœur de l’humilité;

Anne Cailloux
Membre
3 mai 2019 22 h 04 min

Pas faut cette histoire, rabaisser l’autre pour exister
combien de fois….
bravo Christian.