Retour des chants – Christian Satgé

Chanson gaillarde
Cycle toulousain

 

Quand vendemias ou segadas sont terminées,
Tot le vilatge fait chauffer ses cheminées
Pour restaurer la compagnie des hommes las
Qui ont tous bien mérité de se sustenter
– Les ventrus, les bourrus et mêm’ les échalas –
Attablés ensembles vont rigoler et chanter :

« La terre est basse, le ciel est haut
Y’a que la table qu’est à niveau.
Avec les copains et les rivaux
Partageons charcutaille et fayots ! »

Les femnas les ont encor’ gâtés cette année
Et elles servent tablées, sans lambiner,
Toujours gaies, risettas, frisettes et falbalas,
De convives que leur vue ne peut qu’enchanter,
Tapant sur les doigts des goujats ou de ç’ui-là
Qui risque d’rouler sous la table et de s’édenter :

« La terre est basse, le ciel est haut
Y’a que la table qu’est à niveau.
Pare donc le vin neuf des cuveaux,
Buvons pour s’réchauffer les boyaux ! »

Avec les droles, ceuss’ aimant à babouiner,
Les pépis aigris en oublient de chouiner,
Quand les litres coulent, dans leur robe lilas,
Des bouteilles aux veires qu’ils vont ensanglanter
De rires et d’histoires qui repassent les plats
Alors qu’on aime, l’oeil allumé, à chanter :

« La terre est basse, le ciel est haut
Y’a que la table qu’est à niveau.
Mangeons, buvons, blaguons de nouveau
Faisons qu’il n’y ait plus de rabiot ! »

Quand ce beau monde sera chaud à tant dîner
On se quittera dans la nuit bien avinée,
On rentrera à l’hostal, et sans plus d’blabla,
On f’ra mentir l’pinocchio sans fainéanter
Pour nous faire des pitchouns en veux-tu en voilà
Qui, grandis, eux aussi, chant’ront sans se vanter :

« La terre est basse, le ciel est haut
Y’a que la table qu’est à niveau.
Tant pis pour le ritou et ses dévots,
Itou pour les austères parpaillots ! »

 

© Christian Satgé – septembre 2017

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Christian Satgé

Christian Satgé (834)

Obsédé textuel & rimeur solidaire, (af)fabuliste à césure… voire plus tard, je rêve de donner du sens aux sons comme des sons aux sens. « Méchant écriveur de lignes inégales », je stance, en effet et pour toute cause, à tout propos, essayant de trouver un équilibre entre "le beau", "le bon" et "le bien", en attendant la cata'strophe finale. Plus "humeuriste" qu'humoriste, pas vraiment poétiquement correct, j'ai vu le jour dans la « ville rosse » deux ans avant que Cl. Nougaro ne l'(en)chante. Après avoir roulé ma bosse plus que carrosse, je vis caché dans ce muscle frontalier de bien des lieux que l'on nomme Pyrénées où l'on ne trouve pire aîné que montagnard.

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5 Commentaires
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Marie Combernoux
Membre
13 mai 2018 14 h 21 min

Magnifique poème aux accents du terroir, enjoué, plein de saveurs, de couleurs, mélange savant d’expressions et de mots occitans, fêtes “paillardes (mais pas trop)” autant que “gaillardes”, que j’ai connues autrefois après les “vendemias” où le nectar de Bacchus coulait à flots et où les “femnas” s’étaient démenées en cuisine !
Amicalement
MARIE

Invité
12 mai 2018 21 h 16 min

Merci Christian beau partage portant des vibrations de sagesse et de l’amour de la vie, je le trouve un beau tableau dessinant
une vie que je classe comme une partie importante et riche d’un patrimoine culturel d’une société vibrant de toutes ses couleurs et saveurs sociales et relationnelles,. bravo
agréable soirée
Mes amitiés
Fattoum.