Psyché chiqué – Christian Satgé

Petite fable affable en souvenir du « Procès d’Outreau »
« Quand on paie les expertises au tarif d’une femme de ménage on a des expertises de femmes de ménage ! »
(J.-L. Viaux, expert psychologue à la sortie de son audition lors du procès en appel qui eut lieu à Paris, novembre 2005)

Avec un regard hautain, noir, presque crépusculaire,
Un être versé dans les choses de notre esprit,
Fonctionnement, connexions et corollaires,…
Reçoit, au milieu de bibelots hors de prix,
Une femme de ce monde que l’on dit prolétaire.

Sans nul complexe, sauf de supériorité,
Ce cuistre , hélas, se sait l’homme le plus capable
De voir dans le conscient sans ambiguïté,
De dénuder l’inconscient, et cartes sur table,
De sonder le subconscient, de l’ébruiter,…

« Madame, sans vergogne, vous êtes fort coupable !
Responsable d’éduquer à la soumission
Votre fille. Pis, d’en faire une adulte ployable
Aux mâles vouloirs et, par dépréciation,
Une future victime des plus pitoyables !

– Pardon ? répondit la jeune dame interloquée
Par ce prompt jugé et péremptoire préambule
Qui avait de quoi, et sans ambages, la choquer.

– Vous l’habituez à se voir insigne globule,
Inférieure par son sexe, voire moquée.
J’en veux preuve ce dessin. C’est là votre couple,
Tel qu’elle le voit : vous petite et fort rabaissée,
Aux côtés d’un mari dominateur, grand, peu souple
Sans doute, violent peut-être, et elle, effacée,
– L’ego tué – dans un coin comme vieille ensouple.
Si vous connaissiez mon métier comme moi,
Vous seriez effrayée de tout ce que me disent
Ces traits et ces couleurs, d’où mon légitime émoi.
Il me faut alerter qui de droit sans couardise.

Si vous connaissiez ma famille comme moi,
Vous n’auriez jamais exigé cette rencontre,
Ne feriez rien que vous regretteriez.
J’ai peu de savoir certes mais je sais voir, par contre :
Ma fille a un retard de croissance, Vous riez ?,
Quant à moi, ma carte d’identité le démontre,
Je culmine à moins d’un mètre soixante, ma foi.
Mais mon époux, le plus doux des hommes j’en atteste,
Dépasse les deux mètres !… Et voilà si, las, des fois
Ma parole ne suffisait pas, les quelques restes
D’une photo de nous que je conserve sur moi. »

Méfions-nous des a-priori pédants, livresques,
De ceux qui croient nous connaître mieux que nous-mêmes :
Ils sont souvent impayables, ces poseurs, ou presque
Vu leurs tarifs, et plus sots que Bêtise elle-même.

© Christian Satgé – janvier 2018

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Christian Satgé

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Obsédé textuel & rimeur solidaire, (af)fabuliste à césure… voire plus tard, je rêve de donner du sens aux sons comme des sons aux sens. « Méchant écriveur de lignes inégales », je stance, en effet et pour toute cause, à tout propos, essayant de trouver un équilibre entre "le beau", "le bon" et "le bien", en attendant la cata'strophe finale. Plus "humeuriste" qu'humoriste, pas vraiment poétiquement correct, j'ai vu le jour dans la « ville rosse » deux ans avant que Cl. Nougaro ne l'(en)chante. Après avoir roulé ma bosse plus que carrosse, je vis caché dans ce muscle frontalier de bien des lieux que l'on nomme Pyrénées où l'on ne trouve pire aîné que montagnard.

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