Prise de bec à propos d’une volage – Christian Satgé

Petite fable affable

 

« Un beau jour, J’ai perdu ma tramontane !
Pas une de ses amours charlatanes,
Toutes en science qui, las, fuient le jour
Et ignorent à jamais les toujours,
Disait un pigeon au cou vert et rose.
C’était un amour pris sans vers ni prose
Un élan de l’âme, avec foi et feu
Pas dévergondé, déluré un peu.

 

– Mais avec les aiguilles des horloges,
Répliqua le moineau à cet éloge,
Le fil du temps nous coud de ces revers
Qui, dans la gorge, nous restent en travers !

 

– Oui, j’ai perdu Ma Mie, larmes amères,
Celle qui, Germinal ou bien Brumaire,
Me faisait planer jusqu’au bleu du ciel,
Adoucissait tout de sa voix de miel…

 

– Tu t’es fait pigeonner comme tant d’autres !
Pépie le titi : qui, comme un apôtre,
N’aspire qu’à la joie n’est pas au bout
De ses peines !… La vie est fiente et boue !

 

– En roucoulant, on s’est passé la bague
À la patte. Son départ me fut dague
Car je ne suis pas fait d’argile, ami,
Et lui suis fidèle, et pas qu’à demi ! »

 

Le moineau qui a bien moins de cervelle
Que d’appétit encore le harcèle :
« Cœur de pigeon peut-être d’artichaut
Fais comme si de tout ça peut te chaut :
Toits et trottoirs ne manquent pas de belles
Pour guérir ton cœur de cette rebelle !
La mémoire fane les souvenirs
Les plus beaux comme pour les punir
De s’être cru beaucoup plus agréables
Qu’ils n’étaient, en vérité, adorables !

 

La beauté n’est pas moindre, cher savant,
Quand, par malheur, elle s’envole au vent ! »

 

© Christian Satgé – juillet 2015

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Christian Satgé

Christian Satgé (834)

Obsédé textuel & rimeur solidaire, (af)fabuliste à césure… voire plus tard, je rêve de donner du sens aux sons comme des sons aux sens. « Méchant écriveur de lignes inégales », je stance, en effet et pour toute cause, à tout propos, essayant de trouver un équilibre entre "le beau", "le bon" et "le bien", en attendant la cata'strophe finale. Plus "humeuriste" qu'humoriste, pas vraiment poétiquement correct, j'ai vu le jour dans la « ville rosse » deux ans avant que Cl. Nougaro ne l'(en)chante. Après avoir roulé ma bosse plus que carrosse, je vis caché dans ce muscle frontalier de bien des lieux que l'on nomme Pyrénées où l'on ne trouve pire aîné que montagnard.

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Invité
31 décembre 2018 13 h 04 min

Beau récit ! Mais quelle déception ! Je croyais les couples de pigeons fidèles jusqu’à la mort ! Enfin, il y a toujours des exceptions…. Toujours heureuse de vous lire, Simone.

Invité
30 décembre 2018 18 h 16 min

Quelle mie de chien :! L’air de rien, dans les airs c’est un peu comme sur terre. Bécasse ou grive, quand elles s’envolent on est dans le pâté. Je me sens faible ce soir. Alors, il ne me reste plus qu’à vous souhaiter une nouvelle année pleine d’envolées, de fables à table pour votre bonheur (j’espère) et pour le nôtre aussi puisque chat héritier commence par lui-même…

Anne Cailloux
Membre
30 décembre 2018 14 h 23 min

je viens roucouler sur votre belle fable.
Méfiez vous donc Messieurs de ces beaux poitrails..
ANnne