Presse-toi de paresser – Christian Satgé

Petite fable affable

Dans la vierge forêt, un ara s’agitait,
Allait et venait. À tous il voulait paraître,
En son écarlate livrée, l’air affété,
Dans ce décor où tout s’empêtre, s’enchevêtre.
Tout en cris, il bougeait, gigotait, chahutait
À toutes les portes, à toutes les fenêtres.
Un paresseux en vint à se manifester :
« Cesse-donc !… Es-tu le plus inconscient des êtres ?…
Veux-tu tous les chasseurs du pays alerter ?… »
Paré de frais de son plumet jusques aux guêtres,
L’éclatant perroquet, hautain, l’envoya paître
Et, non sans morgue, se mit à l’asticoter.

« Oh ça va !… Ma jeunesse te gêne l’Ancêtre ?!
Je suis beau et, c’est sûr, bon à boulotter ;
Pas comme toi, vieille carne, terne beauté !
Je m’affaire et remue, tout prêt à disparaître…
Agile et habile, rien ne peut m’arrêter
Alors que toi tu ne sais, d’un jour, faire un mètre !
Tremble pour tes os mais laisse-moi caqueter
Danser ou chanter et, peut-être me permettre… »
On ne sut quoi. Alors qu’ainsi il débitait,
Un trait vint à lui clouer net le bec. En traître !

Et l’aï de glisser ce sylvestre secret :
« Si tu veux vivre en paix et très vieux, sois discret ! »

© Christian Satgé – septembre 2011

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Christian Satgé

Christian Satgé (834)

Obsédé textuel & rimeur solidaire, (af)fabuliste à césure… voire plus tard, je rêve de donner du sens aux sons comme des sons aux sens. « Méchant écriveur de lignes inégales », je stance, en effet et pour toute cause, à tout propos, essayant de trouver un équilibre entre "le beau", "le bon" et "le bien", en attendant la cata'strophe finale. Plus "humeuriste" qu'humoriste, pas vraiment poétiquement correct, j'ai vu le jour dans la « ville rosse » deux ans avant que Cl. Nougaro ne l'(en)chante. Après avoir roulé ma bosse plus que carrosse, je vis caché dans ce muscle frontalier de bien des lieux que l'on nomme Pyrénées où l'on ne trouve pire aîné que montagnard.

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2 Commentaires
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Anne Cailloux
Membre
23 septembre 2018 20 h 56 min

Voila qui rabaisse son caquet..
nous sommes si proche deux…
certains plus que d’autres
merci de vos fables Christian, il me ravissent
Anne