Pas de banquet sur la banquise – Christian Satgé

Petite fable affable
 
Une petite bande de pingouins
Ne prenant pas facilement la mouche
D’où, comme on dit dans leur baragouin,
« Une belle maigreur de queue de louche »
Ou « Tire-lire plus fendue que bouche »,…
Cafardent sur leur banquise amoindrie.
Alors, jusqu’à satiété, ça cause
Jamais repus et contredits…

Mais gloutonner de l’air est triste chose :
On ne becquette que jours uniformes
Et heures monotones, à l’unisson,
Au lieu de grain grenu ou d’informes
Grenouilles. Et quant au dernier poisson…
On a l’âme en brume et le cœur à l’ombre
Quand chaque jour vous construit le suivant
À son image, tout en faims sans nombre
Et en disettes, planté face aux vents…

Las d’un régime peu alimentaire,
Nos drôles d’oiseaux vers quelques humains
Veulent se tourner : « Eh, sur cette terre,
Ils sont seuls à prévoir leurs demain,
Stockant « au cas-où » ou bien « parce que… »
Foin de privations, de dénuement,
Fi de famine avec ces verruqueux
Qui ne sont qu’entraide et, plus, dévouement. »

Aussi grincheux que moustachu, un morse
Les arrête. Parant d’humilité
Son orgueil, ce gros faraud un peu torse
Fait, ton poseur : « La générosité
N’est que le fort des estomacs plus vides
Que vos têtes ne sont creuses ! Moi, dont 
La qualité première, impavide,
Est la modestie vous le dis, Dindons !

– Quoi ? Qu’est-ce à dire, Grasse Créature ?

– Quémander à l’Homme est risque et péril :
Contentez-vous de ce que la Nature
Vous offre ou vous finirez au gril ! »

Un de ces pingouins réplique à l’Énorme :
« Quand t’as panse pleine, éléphantiforme,
Que t’as pas à compter tes rations,
Il est aisé de prêcher, dans les normes, 
La sagesse et la modération ! » 

 
© Christian Satgé – mai 2017

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Christian Satgé

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Obsédé textuel & rimeur solidaire, (af)fabuliste à césure… voire plus tard, je rêve de donner du sens aux sons comme des sons aux sens. « Méchant écriveur de lignes inégales », je stance, en effet et pour toute cause, à tout propos, essayant de trouver un équilibre entre "le beau", "le bon" et "le bien", en attendant la cata'strophe finale. Plus "humeuriste" qu'humoriste, pas vraiment poétiquement correct, j'ai vu le jour dans la « ville rosse » deux ans avant que Cl. Nougaro ne l'(en)chante. Après avoir roulé ma bosse plus que carrosse, je vis caché dans ce muscle frontalier de bien des lieux que l'on nomme Pyrénées où l'on ne trouve pire aîné que montagnard.

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3 Commentaires
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Invité
16 avril 2019 15 h 38 min

Bonjour Christian c’est sans modération que ses drôles d’oiseaux, sous ta plume, qui elle vole haut , laisse l’empreinte d’un pingouin
dandinant sa couenne
merci au plaisir de te lire