Mon bled d’enfant – Simone Gibert

peinture S.Gibert

Voici Marrakech,

Ville rouge du sud

Découvrant des chechs

Ce n’est qu’un prélude.

.

Degrés : cinquante deux,

Nous prenons stoïques

Le taxi sous nos yeux,

L’hôtel est magnifique !

.

Le décor oriental,

Parfaitement dosé,

Au parfum de santal,

Nous fait exploser.

.

Quels plafonds travaillés !

Belle lumière,

Des moucharabiehs,

Des jardins au-travers.

.

Nous nous rafraîchissons

A la fleur d’oranger,

Je ressens des frissons

Dans mon passé plongée.

.

Accédant aux chambres,

Verdoyants patios,

Les murets sont d’ambre,

Rehaussant le tableau.

.

L‘immensité de l’eau

De la piscine bleue,

Fait un joli duo

Avec l’ocre du lieu.

.

Enfants, vos yeux brillent,

Nous restons quelques jours

Visitant la ville,

Pour moi c’est un retour.

.

Le bled est le motif

De ce beau voyage,

Mes enfants réactifs

Prennent les bagages.

.

Montant tous en taxi,

C’est en quelques heures

Qu’on arrive, marri,

Et sur moi la douleur.

La petite école

S’affaisse sous son toit,

Et aucun envol

D’oiseau, on ne voit.

.

Le fleuve est réduit

A un simple ruisseau,

Plus rien ne me séduit,

Où sont tes belles eaux ?

.

A l’usine, l’accueil,

Poli, est souriant,

Il faut faire le deuil

De ce passé riant.

.

C‘est ainsi le progrès,

Le site bientôt fermé,

L’usine apparaît

Comme un peu surannée.

.

Barrage en amont,

Les eaux sont retenues,

C’est ainsi pour de bon,

Que tout meurt, tout est nu.

.

Je veux voir les maisons,

“Ma villa” d’enfance,

Sans aucune façon,

Accordé d’avance !

 

.

Elles sont toujours debout,

Toutes différentes,

Voici que tout à coup,

La “nôtre” me hante.

.

La reconnaîtrai-je ?

Les jardins desséchés,

Plus de sortilège,

Mon coeur est asséché.

.

Passant sur la route,

Je m’écrie: “C’est ici !”

Ce qui me déroute,

C’est bien la bergerie :

Un tas de pierres

M’a fait la retrouver,

Aujourd’hui et hier,

“Ma maison” tant aimée.

.

En sanglots m’écroulant,

Mon fils me retient,

Les agents me parlant,

Me créent un soutien.

Depuis la terrasse,

Des arbres, squelettes,

Toi, le temps qui passe,

Tant je te regrette !

Où sont les orangers ?

Les mandariniers ?

Les parfums si légers

Des beaux amandiers ?

.

La cressonnière,

Et l’eau qui y bruisse,

Les pensionnaires,

Grenouilles qui glissent ?

.

Tous les grenadiers

Pliant sous leurs branches,

L’énorme figuier

Douces figues blanches ?

.

Qu’êtes-vous devenues,

Mes exotiques fleurs,

Qui à peine venues,

Sont restées dans mon coeur ?

.

Je n’avais que sept ans,

Je vous ai découverts

Eucalyptus mouvants

Qui embaument les airs.

.

Oum-Er-Rbia, fier,

J’ai plongé dans tes eaux,

Tu me resteras cher,

Malgré ton air nouveau !

.

Nous rentrons en taxi,

Plus de commentaires,

Complètement occis,

Mes larmes, amères.

.

Nous traversons l’hôtel,

Les senteurs d’orangers,

Et le silence est tel

Que mon coeur est léger.

.

Au restaurant-couscous,

Nous dinerons encor,

Apprécié de tous,

Avec un beau décor.

.

Oum Kalthoum

Est bien interprétée,

Il y a des loukoums,

Nous allons déguster.

.

Des airs orientaux,

Lancinants nous bercent,

Chantés en duo,

L’émotion perce …

.

©Simone Gibert

 

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2 Commentaires
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Invité
27 novembre 2018 21 h 04 min

Vos mots en forme de brise qui ramène le passé sont un enchantement. Merci pour ce très beau texte que je ne pourrais jamais écrire puisque je me refuse à retourner sur un lieu où j’ai été heureux.