Mémoires, pages 44 à 46 / 311, par Dominique Capo

Jusqu’à présent, j’ai relaté quelques uns des épisodes les plus marquants m’ayant amené à connaître l’univers des livres dont vous êtes le héros. Dans un autre registre, attardons nous sur un lieu qui m’est particulièrement cher. Certes, les livres dont vous êtes le héros ont eu un rôle déterminant sur ma Destinée. Mais d’autres faits, parfois insignifiants, m’ont marqué au fer rouge. Et parmi ceux-ci, mes séjours dans le Doubs, au sein de notre propriété familiale. C’est à elle que je vais consacrer mes trois prochains chapitres ; avant de reprendre le déroulé des événements survenus à l’aube de mes « Années Noires ».

De ma naissance – pratiquement – à 1991 et le moment où j’ai quitté le nid familial pour mener ma propre existence, j’ai passé la grande majorité de mes vacances d’Hiver et de mes vacances d’Été dans le Doubs. J’y ai ensuite séjourné de deux semaines à un mois entre 1992 et 2007 en quelques occasions.

Aux limites de ce département, à moins d’une quinzaine de kilomètres de la frontière Suisse, se trouve notre héritage matriarcal. Et quand je dis « matriarcal », c’est parce que, aussi loin que remontent mes souvenirs d’enfant, mes arrières grands-parents maternels y ont vécu. C’est parce que mes grands-parents y ont habité durant une bonne partie de leur retraite. C’est parce que ma mère – et parfois mon père – y est allé en ma compagnie, de celle de ma sœur, et de celle de mon petit-frère. L’ultime fois où j’y ai résidé, c’est en 2007, au décès de mon grand-père maternel. Et j’avoue que, parfois, cet endroit me manque.

C’est certainement là que se sont déroulés quelques uns des plus beaux moments de mon existence. De ceux qui restent ancrés en nous jusqu’à la fin de nos jours. De ceux que nous protégeons comme des joyaux à la valeur inestimable.

En fait, c’est mon grand-père maternel qui était originaire de cette région. Ma grand-mère maternelle, elle, est née dans la région lyonnaise. Elle a rencontré mon grand-père durant la Seconde Guerre Mondiale, et c’est à l’issue de ce conflit que celui-ci le la lui a fait connaître. Mais chacun reste profondément attaché à ses racines. Et ma grand-mère n’a jamais véritablement apprécié le Doubs. En Hiver, les températures y descendaient bien au-dessous de zéro assez souvent. C’était parfois enneigé d’Octobre à Mai. Certes, aujourd’hui, ce n’est plus le cas. Le réchauffement climatique y a laissé son empreinte, comme partout ailleurs sur la planète. Pourtant, il est vrai que les conditions atmosphériques peuvent s’y avérer rudes, la neige y être abondante. Et même si ce n’est pas aussi fréquent que jadis, ces périodes de frimas sont susceptibles de marquer les esprits.

Or, ma grand-mère a toujours détesté le froid. Mes grands-parents ont, deux décennies durant, vécu en Afrique après la fin de la guerre. C’est à Dakar que ma mère est venu au monde. Ils y travaillaient pour une société de forage pétrolier ou gazier dont les puits étaient disséminés dans l’ensemble de l’Afrique de l’Ouest. C’était alors la pleine période de la Décolonisation. Et, en tant qu’expatriés, ils y ont eu une vie très agréable : location de villa, employés de maisons, transports, voyages, aux frais de leur entreprise. Je suis convaincu – malgré qu’ils n’en parlaient pas énormément – qu’ils ont considéré cette vingtaine d’années comme un Age d’Or. Et je suis persuadé que c’est avec regret qu’ils sont revenus en France au milieu des années soixante.

Quand j’observe ma grand-mère à son insu – elle est encore vivante et loge avec ma mère depuis la mort de mon grand-père – elle a parfois les yeux vides. Je suis sûr qu’elle se remémore des épisodes heureux d’alors.

Les décades ultérieures, jusqu’à actuellement, ont connu de grands bouleversements, c’est vrai ! La société a changé, les mentalités aussi. La technologie s’est implantée en force dans la grande majorité des foyers français ou d’ailleurs. Les Trente Glorieuses sont révolues, et nous subissons désormais crises financières, crises écologiques, crises de l’Emploi, etc. Le « Temps des Colonies », pour reprendre le titre d’une chanson de Michel Sardou, n’est plus qu’un lointain souvenir. Et ma grand-mère est complètement perdue face à toutes ces métamorphoses. Elle se raccroche désespérément, ainsi que le font généralement toutes les personnes de son age, à cette ère insouciante et sans problèmes qu’était celle de sa jeunesse : trente ans où le plein emploi était une réalité, où la France possédait des territoires sur tous les continents, et où la population s’enrichissait aisément.

A suivre…

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