Lettre à l’îlien – Christian Satgé

Désormais, tu as pour nouvelle adresse
Là où les alizés la peau caressent,
Où le jour est senteurs, hâle et douceurs
Là où même le temps a oublié l’heure
Et où tu peux redevenir penseur
Quand parfois, lassées de toi, les nues pleurent…
Tu as choisi pour séjour ces lieux
Où tu es inconnu même des dieux,
Où tu es toi, sans souci ni artifice
Où la nuit se donne à la nuit,
La nuit qui a, suave édifice, 
Saveurs, repos et langueurs pour fruits…

Tu demeures donc en ces antipodes
Tout d’indolence balançant entre odes,
Patience et silence, ce néant
De nos vies sans sel que l’on croit si « belles »,
Dans une île, oasis dans l’océan,
Navire dont tu règnes sur l’embelle…

Tu penses souvent à nous me dis-tu,
Toi qui qui as laissé ton rêve têtu
D’aventure te mener à ce monde,
Derrière le fil de l’horizon,
Laissant le reste de la mappemonde
À sa morne routine, à ses prisons…
Derrière ce fil sur lequel glisse
Un rideau d’azur tendu, où, complice,
 Le drap à peine froissé de l’océan
S’accroche, tu as laissé faim et guerres,
Bien pensants et mécréants céans
À leurs questions, tiennes naguère…

La fuite était donc solution ?
Allons, toi qui n’étais que passions !…
Je te laisse à tes paradisiaques
Beautés et retourne à cette laideur
Qui fait mes jours et rend insomniaques

Mes nuits, toujours plus seul et frondeur…

 

© Christian Satgé – juillet 2019

Nombre de Vues:

42 vues
Christian Satgé

Christian Satgé (834)

Obsédé textuel & rimeur solidaire, (af)fabuliste à césure… voire plus tard, je rêve de donner du sens aux sons comme des sons aux sens. « Méchant écriveur de lignes inégales », je stance, en effet et pour toute cause, à tout propos, essayant de trouver un équilibre entre "le beau", "le bon" et "le bien", en attendant la cata'strophe finale. Plus "humeuriste" qu'humoriste, pas vraiment poétiquement correct, j'ai vu le jour dans la « ville rosse » deux ans avant que Cl. Nougaro ne l'(en)chante. Après avoir roulé ma bosse plus que carrosse, je vis caché dans ce muscle frontalier de bien des lieux que l'on nomme Pyrénées où l'on ne trouve pire aîné que montagnard.

S'abonner
Me notifier pour :
guest

8 Commentaires
Commentaires en ligne
Voir tous les commentaires
Elisabeth Lepage
Membre
14 novembre 2019 21 h 12 min

C’est très beau, plein de mélancolie. J’aime beaucoup et c’est très agréable à lire

Invité
13 novembre 2019 21 h 11 min

Merci pour ce très joli texte que j’apprécie vivement !

Laurence de Koninck
Membre
13 novembre 2019 11 h 27 min

Très beau texte dans un genre différent qui me plaît tout autant. Merci Christian!

Invité
13 novembre 2019 9 h 43 min

Bonjour et bravo Christian pour cette lettre si touchante et si attanchante j’ai aimé ma lecture matinale.
Agréable journée
Mes amitiés
Fattoum.