L’étérnel retour – Anne Cailloux

Sur sa peau parchemin, les années serpentent, entre rides et sillons.
Ses bras décharnés comme du vieux bois desséché, nous indiquent, que le temps de la rédemption se rapproche.
Ses cheveux blancs immaculés, donnent le ton d’un homme qui prend soin de son enveloppe charnelle, offrir au moins cela !
Ses souvenirs s’accrochent sur le bord de ses yeux délavés, regardant l’horizon, au delà de la ligne Maginot, quittant momentanément ce monde qui n’est plus le sien.

Les stigmates de ce qui fut son destin, s’offrent à la vue de tous, comme un poster de cinéma où il joue le premier rôle. Les années hippies s’affichent dans son accoutrement, nul besoin de se poser de question, tout est dit en un regard.

Dans ce train qui va à contre sens, ses prunelles se perdent dans une imagination féconde, dans un déjà vu. Le roulement de tambour du TGV, frappe le tempo,  comme une batterie, ses doigts ridés par le soleil et déformés par l’arthrose, battent la mesure sur une musique de Santana.
Le train disparaît, les kilomètres également. Jimmy a de nouveau 20 ans :
1960, New York, comté de Sullivan ; le concert de l’année, deviendra le plus grand concert de tous les temps.
Un sourire prend possession de son âme, la liberté dans tous les sens du derme.
Son cœur se souvient, son corps également, son esprit ravive cette fille, aux yeux bleus délavés.

Il persiste et signe depuis toutes ses années, ce n’est pas un look qu’il veut offrir, c’est une vie, un état d’âme, une façon de pensée, une façon d’être, qui s’appelait tolérance, qui s’appelait respect pour son prochain, pour la faune, pour la flore.
Un doux rêveur qui ne veut pas de cette terre, qui ne changerati sa place, ni son âge pour rien au monde.
La nudité sans le regard de l’autre, en toute innocence, les fleurs dans les cheveux, le partage de pas grand-chose pour tous. S’endormir à la belle étoile avec Star spangled banner de Jimi Hendrix. Un solo de guitare dans lequel l’homme imite les bombardements des B52 de la guerre du Vietnam, Une folie pour le monde entier.
La blonde aux yeux bleus délavés danse sous des lumières psychédéliques, aidé par leurs amis, le LSD. l’éléphant sera bien rose avec de longs cheveux rouges, il galopera à cheval sur la mère Michel.

Une voix le fait sursauter, le Van bleu aux fleurs roses disparaît, la route reprend sa place, les kilomètres défilent de nouveau, une voix douce le ramène à la réalité. Contrôleur, veuillez présentez votre billet Monsieur.
Il présente son billet au contrôleur, se demandant si le concert est déjà commencé.
Il ne sait plus son âge, ni où il est, mais ce qui est certain, c’est que ses amis l’attendent dans un Van aux couleurs psychédéliques.
Geerta la belle hollandaise sera là à musarder avec les autres..
Il s’est de nouveau absenté dans ces années Freedom. L’homme n’entend pas même plus, la voix dans le haut parleur.
Bienvenue dans ce train en direction de Montpellier . Nous arriveront vers 14 heures, la SNCF vous souhaite bon voyage.
L’homme sourit : pas si loin New-York en fin de compte se dit-il.
Le V de la victoire du Peace and love, salut de nouveau le contrôleur..

Selon que vous serez fou ou sage, vous composerez les rêves de votre vieillesse, les regrets de votre jeunesse et des espérances pour l’éternité.
Victor Hugo.

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Anne Cailloux

Anne Cailloux (339)

Depuis ma naissance, je fus autodidacte et trop rêveuse.Spécialiste dans l'art thérapie et les maladies neurodégénératives, j’essaie de retenir le temps des autres et du mien.. Quelques diplômes, une passion pour l'art et les poètes. J'ose dormir avec Baudelaire.Je suis une obsédée textuelle . Je peins, je crée et maintenant j’écris. Je remets cent fois mon ouvrage pour me corriger. De quinze fautes par lignes je suis passée à quinze lignes pour une faute... Deux livres en préparation et peut-être un recueil de poèmes, si Dieu veut.Anne
Je suis une junky des mots..

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OberLenon
OberLenon
Invité
9 mars 2020 20 h 23 min

Les hippies ont testé toutes sortes de voies dans le but de libérer les consciences, élever les âmes . Votre texte est riche de perceptions et vous posez bien l’image de l’éternel errant . J’ai beaucoup aimé

Brahim Boumedien
Membre
9 mars 2020 19 h 07 min

Merci, Anne, pour ce partage, cette réflexion sur la vie, sur l’âge !

Christian Satgé
Membre
9 mars 2020 16 h 05 min

Une observation fine de la psychologie de ceux qui ont connu et vécu ces années-là. Ça sonne aussi vrai et fort que si vous les aviez vécues, alors que vous êtes si jeune… Bravo t merci pour ce partage où la beauté de al nostalgie se marie à la force d’une aujourd’hui pas toujours facile à vivre.

Invité
9 mars 2020 15 h 56 min

Merci pour ce texte si complet et nostalgique : cette génération Woodstock” me parle … A l’époque, pour nous, colliers de coquillages assez magnifiques à la plage.