Les deux oiseaux – Christian Satgé

Petite fable affable

Deux gros oiseaux, ayant le même âge,
Élevés dans une même cage,
Frères de surcroît,
Éduqués et instruits de même,
Connurent, est-ce vraiment problème ?,
Par erreur je crois,
L’envol de la liberté vers les limbes
De l’azur et les nues qui le nimbent
Ou, parfois, le broient.

Mais chacun d’eux, du même apprentissage
N’a pas retenu les mêmes passages
Ni tiré des fruits
Semblables, ce qui étonna merles
Et pinsons qui commentaient leurs perles,
Hélas, à grand bruit…
Même les arbres en bruissaient, ma Chère,
Jusqu’à leur orée et aux jachères
Où vaquaient les truies.

Le premier était piaffe et superbe,
Le second plus sage qu’un proverbe
Semblait empoté ;
Si l’un faisait ripaille et bombance,
Volant vite en toute confiance
Au haut de futaies,
L’autre gobait peu ou faisait maigre,
Son vol n’était en rien allègre
Ni un fils d’Atê.

La forêt s’interrogeait sur ces frères
Qui différaient tant : l’un téméraire,
L’autre timoré.
Homme ni bête ne trouvant réponse
À la chose, fort vite on renonce
À plus loin forer.
Un vieux chêne prit la parole
Alors, dans les brumes en fumerolles,
Pour subodorer :

« N’est-ce pas là Loi de la Nature :
Mes branches n’ont pas même droiture
Quoique nées de moi,
Taille identique ou pareille forme,
De la même sève nourries. Norme,
C’est dit sans émoi !,
Qu’on note chez mes cousins et frères
Ici ou ailleurs. Alors pourquoi braire
Ainsi pour des mois ? »

Nos différences font que nous sommes
Des semblables qui ne sont pareils
– Même dans le plus simple appareil –
Notre richesse naît de leur somme…

© Christian Satgé – janvier 2019

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Christian Satgé

Christian Satgé (834)

Obsédé textuel & rimeur solidaire, (af)fabuliste à césure… voire plus tard, je rêve de donner du sens aux sons comme des sons aux sens. « Méchant écriveur de lignes inégales », je stance, en effet et pour toute cause, à tout propos, essayant de trouver un équilibre entre "le beau", "le bon" et "le bien", en attendant la cata'strophe finale. Plus "humeuriste" qu'humoriste, pas vraiment poétiquement correct, j'ai vu le jour dans la « ville rosse » deux ans avant que Cl. Nougaro ne l'(en)chante. Après avoir roulé ma bosse plus que carrosse, je vis caché dans ce muscle frontalier de bien des lieux que l'on nomme Pyrénées où l'on ne trouve pire aîné que montagnard.

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Invité
18 janvier 2019 12 h 08 min

J’aime votre poème, Christian. J’en apprécie la morale, et la photo jolie.