Le yack & l’astrologue – Christian Satgé

Petite fable affable

Loin des rumeurs d’une rue qui n’est plus diserte
Et des échos de corridors, un brin bourru,
Un yack, auprès d’une lamaserie déserte,
Espère un astrologue, devin fort couru
En ces contrées lointaines. Un mien comparse
M’en a conté le cas comme, hélas, d’une farce.

Et notre gros laineux faisait dévotion
Avec force courbettes des plus diligentes
Et nombre de révérences de soumission.
Il va, esprit content et cœur joyeux, par les sentes,
Répétant ce que dit la foi qui le régente :
« Il n’advient désastre ni désagrément
À qui adore les astres sincèrement
Aussi abstenons-nous de cabaler contre eux :
Nous ne serons jamais ici-bas miséreux ! »

Maladroit et gauche, il attendait de l’oracle
Qu’il lui dise, simplement, comment allait
Se dérouler son proche voyage, la débâcle
Menaçant les lieux où il va balader
Sa graisse. « De grâce, un mot, un seul, ô Grand Sage !
Je vous ai jà porté de quoi vous rendre hommage. »

Il avait disposé, lui qui mangeait si peu
Et souvent pas, devant le maigre horoscopiste,
De quoi nourrir grassement le plus adipeux
Éléphant mais ce-dernier comme un papiste
Répliqua : « Si j’ai bonne mémoire, lampiste,
Parfois par mégarde, souvent par ennui,
Ma foi, en mon esprit brouillard se produit :
Qui êtes-vous cher cornu qui venez à moi ?

– Votre plus grand fidèle !… Depuis des mois !

– Se peut ! Fit le cabaliste. Mais quelle affaire
De grande conséquence vous inquiète tant ? »

La stérilité de ses idées fait qu’il s’enferre
Mais le yack n’y voit goutte et, pis, entend
Obtenir à ses tourmenteux soucis réponse.
Va-t-il mourir en route ? Il attend son annonce.

Qu’opiner à la question inopinée ?
Le mage, après un temps, inspiré, lâcha juste
un « Va ! » qui rassura le velu boudiné
Lequel mourut en chemin, quoique fort robuste,
Alors qu’il voulait éviter de périr, ce fruste.
Ne permettez jamais, Ami, d’être à quelqu’un
Votre priorité quand, las, pour ce péquin
Vous, vous n’êtes, au mieux, qu’une moindre option*
Voire la source d’une spoliation…

© Christian Satgé d’après une phrase de Mark Twain (*) – juillet 2020

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Christian Satgé

Christian Satgé (834)

Obsédé textuel & rimeur solidaire, (af)fabuliste à césure… voire plus tard, je rêve de donner du sens aux sons comme des sons aux sens. « Méchant écriveur de lignes inégales », je stance, en effet et pour toute cause, à tout propos, essayant de trouver un équilibre entre "le beau", "le bon" et "le bien", en attendant la cata'strophe finale. Plus "humeuriste" qu'humoriste, pas vraiment poétiquement correct, j'ai vu le jour dans la « ville rosse » deux ans avant que Cl. Nougaro ne l'(en)chante. Après avoir roulé ma bosse plus que carrosse, je vis caché dans ce muscle frontalier de bien des lieux que l'on nomme Pyrénées où l'on ne trouve pire aîné que montagnard.

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4 Commentaires
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Invité
2 juillet 2020 23 h 02 min

merci pour Le partage de cette fable……
même si elle n’est pas tant que çà affable !!!

sourire.

PS : impossible de laisser une note car j’aurai mis sept étoiles , par principe je préfère laisser un commentaire quand j’aime …..

Brahim Boumedien
Membre
1 juillet 2020 18 h 52 min

Merci,Christian, pour ce partage fait généreusement par un homme sage !