Le gibbon et el boa – Christian Satgé

Petite fable affable
 
Tout en bonds et rebonds, un gibbon
Court la jungle comme une tête folle.
Ce vagabond joue des jambons
De branche en branche et, fol, toute faune affole,
Y compris un boa nauséabond.
Et, tout en bubons, ce barbon arboricole
Est furibond, genre casse-bonbons.
 
Oui, le lové sert las souvent de trampoline
Au singe, gibier peu pudibond,
Qu’il rêve d’embrasser, de serrer d’une câline
Étreinte avant d’avaler pour de bon,
Par les bambous debout aux ombres corallines,
Dans les parfums de la vanille bourbon.
Car cet excité velu n’est qu’indiscipline…
 
Ça lui ferait de fort belles bajoues
Que ce repas, mais notre serpent va à la lente.
L’autre cabotin, bravade ?, s’en joue
Dans ses sabbats ou ses fantasia hurlantes,
Et autres hourvaris de sapajous.
Or Boa n’a ni détente ni crocs qu’on plante.
Il appelle, pour se défaire de ce joug,
Un sien cousin et varan de son espèce,
Vaguement astrologue, amateur de bijoux
Donc un brin alchimiste, cette peau épaisse
De lézard lui dit : « Avec ces joujoux,
Faut se faire liane par les pesses ! »
 
Ne restant pas de bois en sa forêt,
L’ophidien, comme corde, se laisse pendre.
Le singe n’ayant mie sous le béret,
Au hasard s’en saisit et, las, se fit surprendre
Par le prédateur le serrant de près,
Offrant un tourment à chacun de ses méandres.
Puis il goba sa victime d’un trait.
 
Ainsi la paix lui revint, enfin, en ses sommes.
Et ce démon, rotant comme un goret
Après son si minutieux festin, bonhomme,
Pensa : « Pour connaître un total arrêt
À tes affres pas besoin d’aller jusqu’à Rome :
Face au loup pense comme un loup madré,
Et face au con sois con. Voilà le seul axiome ! »
 
© Christian Satgé – septembre 2019

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Christian Satgé

Christian Satgé (834)

Obsédé textuel & rimeur solidaire, (af)fabuliste à césure… voire plus tard, je rêve de donner du sens aux sons comme des sons aux sens. « Méchant écriveur de lignes inégales », je stance, en effet et pour toute cause, à tout propos, essayant de trouver un équilibre entre "le beau", "le bon" et "le bien", en attendant la cata'strophe finale. Plus "humeuriste" qu'humoriste, pas vraiment poétiquement correct, j'ai vu le jour dans la « ville rosse » deux ans avant que Cl. Nougaro ne l'(en)chante. Après avoir roulé ma bosse plus que carrosse, je vis caché dans ce muscle frontalier de bien des lieux que l'on nomme Pyrénées où l'on ne trouve pire aîné que montagnard.

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4 Commentaires
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Anne Cailloux
Membre
21 novembre 2019 22 h 20 min

Vous avez raison Christian, faut prêcher dans la paroisse du curé pour bien comprendre..
on ne se lassera jamais de ses fables qui sont si vrais.
Merci à vous Christian
Anne

Brahim Boumedien
Membre
21 novembre 2019 14 h 10 min

Merci, Christian, pour ce partage qui nécessite sur un plan pratique, astuce, patience et courage !