Hier, de ma mémoire S’est ouvert un tiroir, Ses images froissées, Conjuguées au passé Par un enchantement, Se meuvent en présent. Dans le vestibule, Des conciliabules Me parviennent étouffés Jusque sur le palier, Ce sont les jeunes gens Qui passent en riant… Dans ce vestibule Est un grand “bidule” Un haut porte-manteaux Travaillé au couteau, Comportant un miroir Où chacun vient se voir.
Je l’appelle Mémé, Ma quatrième année … J’ai une soeur là-haut Qui dort dans son berceau. Je descends l’escalier, Sur mon bras replié, Mes habits de “gala”, Quelqu’un dit “la voilà , On la croit endormie, Mais non, la revoici !”.
La maison est prête, Musique à tue-tête, Bugnes dans les paniers Des plateaux soulevés Par-dessus nos têtes, Ce soir, c’est la fête !
Là, c’est ma Grand-Mère Qui partout s’affaire, En bas, c’est la cohue, Tous les clients affluent Les uns sont attablés Dans la salle à manger, Les autres ont investi La cuisine aussi ! |
Des rires, des chansons, Clamées à l’unisson, La convialité Est ici magnifiée, Lorsque les plats fumants Séduisent les gourmands.
Le flou du temps lointain Me restitue le moins Qui me permet pourtant De saisir ces moments Défroissant l’image Fuyant en nuage. Voici mon Grand-Père Remontant des bières Dans la grande salle Où se tiendra le bal, Là-haut cligne le noir, Et dans ma mémoire…
L’arrière Grand-Mère Et sa tabatière Dans la poche cachée De son grand tablier. Ce soir est-elle là ? Je ne m’en souviens pas.
Je cours près de Maman, Quel est mon vêtement ? Ce n’est pas un tracas, Ce soir c’est Mardi-Gras ! Mais je n’ai oublié De Maman la beauté.
Ils sont tous des copains, Mon Oncle musicien, Le saxophoniste, Bientôt sur la piste Que l’on a arrosée, Ils nous feront danser … | Je perçois les flonflons, Je suis sur des charbons, Piétinant, trépignant, “Vas donc !” me dit Maman, Les deux marches sautées, Je suis prête à veiller.
A droite, un guichet, Y a-t’il des billets ? Ma mémoire s’effrite, Tous se précipitent, Le bar est assiégé, Les tables réservées …
La musique explose, Et ce petit ose Inviter Simone Et ils tourbillonnent A chaque cadence Leur corps se balance, Ils dansent, ils dansent !
Mais cette âcre odeur De tabac, de sueur, De bière, de poussière Est plus qu’un mystère Pour les deux innocents Qui s’enlacent en dansant. Ils dansent, ils dansent !
La petite fille A les yeux qui brillent La danse l’habite C’est ce qu’elle hérite Cette distraction Devenue passion. La petite fille A les yeux qui brillent, La danse l’habite, C’est ce qu’elle hérite De cette distraction, De ces temps de passion, La danse, la danse …
©Simone Gibert |
Tandis que vous brodez vos jolis mots, la pellicule déroule son histoire familiale… Texte très vivant où l’envie de me mêler à la foule me prend. Toutes vos belles images d’un autre temps est un régal pour les yeux. Merci Simone.
Magnifique partage nostalgique j’adore bravo Simone
Encore merci Chrisian Satgé, ces souvenirs si lointains ne peuvent peut-être pas être appréciés !
J’adore ces récits nostalgiques tout en verve et en vers… Bravo et merci pour ce partage.