Le coq devenu girouette – Christian Satgé

 

Petite fable affable

 

Un coq caquetait après avoir fort cocoricoté :

« Je règne, hélas, sur une poulaille qui ne mérite

Que mon bel ergot, pas mon ego, car elle m’a ôté

Toute patience. Oui da, cette bande d’hypocrites,

Sale, ingrate, vulgaire, désobéit à loisir

À mon ordre moi qui, d’un seul cri, tous les matin, ordonne

Au soleil de se lever tôt car tel est mon bon plaisir :

J’ai dressé le roi du ciel qui encor’ ses faveurs me donne 

Et pas ces pécores qui n’ont et ne me font que soucis,

Jamais contentes qui, sans sursis, maugréent sur ça, sur ci ?! »


Lui, qui s’usait à régler les différends et les problèmes, 

Par des compromis qu’on jugeait toujours insatisfaisants,

Enviait son bon cousin du clocher voisin, un blême

Emblème, à jamais impavide, le grand monde toisant :

Sans dire mot, il donne une direction à suivre

Sans que personne ne crie à l’infamie et si d’avis,

Il change, nul ne lui conteste l’aura de son cuivre,

Ni ne proteste quoi ou qu’est-ce. Et ainsi va la vie

De ce si haut souverain si altier que même l’Homme 

Regarde avec respect. Notre coq l’envie il faut voir comme !


N’y tenant plus, un soir, il grimpe sur le toit du clocher

Qui lui fait de l’ombre et son grand frère de fer il renverse.

Ah, il fait moins le fier le déchu dont, sans flancher,

Il prend la place !… Notre coq domine enfin, sous l’averse

Ou le soleil, le monde et tous ses aléas avec tant 

De hauteur qu’il ne les voit pas plus que sa si chère glèbe


Et, pour que ses plumes restent au poil, il prend l’air du temps.

C’est ça « gouverner » : être si grand qu’on ne voit plus la plèbe

Et plutôt que “prévoir” ou “choisir”, tourner son cul au vent.

C’est ce que nos bons dirigeants font de plus en plus souvent !

 

© Christian Satgé – octobre 2016

 

 

 

 

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Christian Satgé

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Obsédé textuel & rimeur solidaire, (af)fabuliste à césure… voire plus tard, je rêve de donner du sens aux sons comme des sons aux sens. « Méchant écriveur de lignes inégales », je stance, en effet et pour toute cause, à tout propos, essayant de trouver un équilibre entre "le beau", "le bon" et "le bien", en attendant la cata'strophe finale. Plus "humeuriste" qu'humoriste, pas vraiment poétiquement correct, j'ai vu le jour dans la « ville rosse » deux ans avant que Cl. Nougaro ne l'(en)chante. Après avoir roulé ma bosse plus que carrosse, je vis caché dans ce muscle frontalier de bien des lieux que l'on nomme Pyrénées où l'on ne trouve pire aîné que montagnard.

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