La peur du Loup – Philippe X

Le loup  est un symbole plus qu’un animal.

    Dès mon arrivée dans ce monde, je me suis senti mal à l’aise.
Étranger parmi la foule qui m’entourait, au sein d’une famille recomposée, mis de côté dans le milieu professionnel, je ne trouvais pas mes marques.

    En manque de références et d’écoutes, je me suis mis très vite en dehors de la société. Je devenais un rebelle.
L’instruction me faisant défaut, j’ai cherché un symbole de révolte, sans trop savoir ce que cela représentait. 

    J’aurais pu devenir casseur, voleur, gibier de potence, détrousseur, je ne le fus pas mais « retrousseur » de jupons, je l’avoue, je pris goût.

    Comme tout adolescent, j’avais peur de l’avenir par ignorance, et j’ai voulu à mon tour que les autres connaissent cette peur de l’inconnu.


Pas besoin de chercher bien loin, qu’est-ce qui fait peur aux enfants : LE LOUP.

    Plus tard, j’ai découvert les qualités du LOUP, son mode de vie, le parallèle existant entre le parcours de cet animal et celui de l’homme, son rejet par la société, celle-la même dans laquelle je me sentais à mon tour étranger.
Pour mieux comprendre ces dérives, je vous rappelle que la peur du loup est ancestrale, et bien que ne touchant pas tous les peuples, elle est dominante en Europe.

    Le loup est à l’origine d’un nombre impressionnant de contes, de légendes, d’expressions relatives aux Loups et à leurs “personnalités”. Qui n’a jamais entendu parler du Petit Chaperon Rouge (qui représente 29 % des contes cités par les personnes interrogées), de Pierre et le loup ou encore des 3 petits cochons ? 

    J’attire par ailleurs votre attention sur cette publicité montrant 3 petits cochons crétins, vantant les bienfaits du lait et de ses dérivés.

    On ne vous montre pas le joug invisible tenant les 3 petits enfants esclaves du lobby des marchands de lait et desserts sucrés-obèses. Cet animal a déchaîné sur lui la crainte et la haine. L’ignorance et la peur engendrées étaient ensuite entretenues par les récits accusant le loup, qu’il soit coupable ou non, des pires forfaits, ceux-ci étant volontairement  exagérés.

    On prêtait d’ailleurs aux loups des pouvoirs surnaturels d’origines rien moins que lucifériennes.

    On assurait au douzième siècle que le loup est un animal terrible. Sa morsure est venimeuse… L’herbe ne repousse plus là où il est passé “… Le nom même de ” loup “ était devenu tabou, le prononcer revenait quasiment à invoquer le diable.

    Certains pensaient en effet que parler du loup le faisait apparaître, cette vieille croyance est parvenue jusqu’à nous avec le proverbe : quand on parle du loup, on en voit la queue !

    Autre ” pouvoir surnaturel “ attribué au loup  :

    – la lycanthropie ou le mythe du loup-garou. Cette croyance est très ancienne, en effet Hérodote en fait mention au cinquième siècle avant J.-C., et aujourd’hui encore la légende subsiste.

    La très sainte église catholique n’y a pas été de main morte, n’a-t-elle pas associé loup et féminité ?

    Au sommet de la pyramide alimentaire, pour gérer l’équilibre naturel, on trouve les plus grands prédateurs, parfois appelés super-prédateurs.

    Parmi eux, le tigre, le lynx, l’ours, le lion, le loup, … Et l’homme !

    Tous sont en danger ou carrément en voie d’extinction, sauf un : l’homme.

    Bien souvent, remplis de bonnes intentions, des écologistes, naturalistes et autres partent, de bonne foi, donner des leçons aux peuples d’Afrique, d’Asie ou d’ailleurs.

    Ceux-là même hésiteraient davantage avant d’ouvrir les portes de leurs paisibles territoires au loup. 

    La peur du loup commence par cette domination que l’homme a voulu installer entre lui et les autres super-prédateurs.

    Bien qu’elle dure toujours, la rivalité entre ces deux super-prédateurs que sont l’homme et le loup est ancestrale. Beaucoup de peuples ont eu un grand respect pour le loup et d’autres une grande haine, mais tous, à un moment ou à un autre, l’ont pris en exemple.

    Nos ancêtres lointains, nomades, qui vivaient et chassaient en petites bandes, n’étaient pas tellement différents des loups
– Je cite : C’est en meute que l’homme a appris la vie en société et non à l’usine.

    Les chaînes qui enserrent vos chevilles ont pour modèle des fiches de paye !

    – Je cite : On s’est trompé en édifiant une éducation en combat contre les instincts.
Les plus grands penseurs ont contribué à forger des croyances qu’ils présentèrent sous forme de connaissances dans leurs traités.

    Platon, repris plus tard par Aristote, puis par Pline, disait de se méfier du regard malfaisant du loup, qui jette des éclairs et paralyse.

    En fait, le loup peut voir dans la nuit et possède, dans l’obscurité, des yeux phosphorescents semblables à ceux du chat.

    Aristote croyait ses vertèbres cervicales soudées. (CARBONE, 1991, 56). Hérodote, au Ve siècle av. J.-C., fait mention de phénomènes de lycanthropie, et jusqu’au XVIIe, des gens soupçonnés seront condamnés à mort en Europe. (CARBONE, 1991, 91).

    « Le loup est un animal terrible. Sa morsure est venimeuse parce qu’il se nourrit volontiers de crapauds. L’herbe ne repousse plus là où il est passé. » (cité par CARBONE, 1991, 14)

    Cette déclaration de Barthélemy, l’Anglais, n’avait rien de marginal au VIIe siècle. Bien au contraire, elle reflète ce que les auteurs d’histoire naturelle et tous croient.

    C’est à peu près ce que tous les bestiaires du Moyen-Age considèrent communément.

    Plus tard, sous Louis XIV, un stratège proposera à son roi un plan de conquête de l’Angleterre comme suit : « Un loup mange un homme en deux jours, débarquez dix-mille loups Outre-Manche, en quelque temps, il n’y aura plus un seul Anglais. » (CARBONE, 1991, 16). Henry III, en 1583, s’inquiète du sort de ses «sujets habitant des villages et plat pays » car on parle d’une race pervertie préférant le berger au troupeau et la tendre chair d’enfant à toute autre. »

    A divers endroits durant le XIVe siècle, les récits coïncident étrangement à propos de disparitions de jeunes filles.

    Bref, je n’ai pas fait dans la facilité en endossant cette pelisse de bête damnée.                                           Et si « j’aurais su j’aurais pas venu » .

    Pas si sûr, il y a des vêtements style costards sur-mesure, qui vous sont taillés et qui tombent au poil.

    J’ai bien cherché dans mes différents entourages, il n’y a que le Loup qui m’aille comme un gant.

    Bon, vous l’aurez compris, la pelisse du Loup est parsemée d’étiquettes qui sont à tort ou à raison collées à bon escient.

    Vous comprendrez que ma chanson préférée est «  la mauvaise réputation » de ce bon vieux Georges BRASSENS… Excusez-le du peu !

    Interrogé récemment par une « friend-facebookienne » :

    Pourquoi diable s’être lancé dans l’écriture, vos pattes de Loup ornées de magnifiques griffes ont déchiré beaucoup de papier ?

    Pourquoi pas la musique, le chant ou la cuisine ou le macramé ?

     -Je cite : ”J’écris pour ne pas assassiner” Voyez combien la littérature adoucit les mœurs ! Alors tirons chaque mot à bout portant, comme une mise à mort’(terra Ignota )

 … a répondu le Loup que je suis…..et Vous, me suivez-vous ? 

.

©Philippe X – 26/092019  

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Philippe X

Loup Zen (13)

'' nul n'est prophète en son pays''...c'est pour cette raison que je voyage.
''Convier quelqu’un, c’est se charger de son bonheur pendant tout le temps qu’il est sous notre toit.''...vous êtes mes invités, au banquet de la littérature....

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Anne Cailloux
Membre
27 septembre 2019 23 h 12 min

J’aime que l’on redonne ses poils aux loups.
Si longtemps décrié. Effectivement on la accusé de tout les maux…
Moi je l’aime.
Dans les Vosges, j’ai croisé un loup à quelques mètres. au milieu d’une foret
Il m’a regardé, je n’ai pas bouger. Il a sut, il est parti tranquillement en me tournant le dos.
Quand j’ai raconté ça aux gens certains m’ont dit : Tu n’as pas eu peur?
j’ai dis non j’ai pas eu peur, mais si j’avais croisé un mec à 9heures du mat en faisant mon jogging
là j’aurais eu très peur.
Que tout le monde le laisse tranquille à ce pauvre loup. effectivement ce n’est pas un mouton mais un loup. heureusement qu’il à de quoi ce défendre. Comme vous dites, il reste un alpha, on le prends comme il est.
MAIS CE N’EST PAS A L HOMME DE LE JUGER.
Que l’on se regarde le nombril avant.
Anne

OberLenon
OberLenon
Invité
27 septembre 2019 18 h 12 min

Vivre une vie de loup, ce serait peut-être se laisser guider par l’instinct et l’intuition pour trouver un équilibre, fondé sur la coexistence …
J’ai aimé cet écrit dans lequel transparaît votre appétit de liberté.
Et à Brassens, je répondrais : “Les loups sont entrés dans Paris” . Evidemment, la perche était tendue

Invité
26 septembre 2019 22 h 53 min

J’aime à penser que “vous êtes” un loup tel que je l’imagine, loyal et fort…ne craignant personne…avec un cœur gros comme ça, même s’il reste caché entre les mots…
Votre témoignage va bien dans ce sens avec cette note d’humour qui vous va si bien !
Merci Philippe pour ce très beau témoignage
Amitiés

Chantal

O Delloly
Membre
26 septembre 2019 21 h 31 min

Assez jubilatoire de sa profondeur
Belle écriture, merci à vos dents restées sur la feuille
Ol

Christian Satgé
Membre
26 septembre 2019 20 h 52 min

Plus lupin que le premier Arsène venu, cher loup, je te retrouve bien là à défendre to totem avec raison. Vive le loup, et surtout notre loup. Un certain renard !