Sur les trottoirs de bitume entachés de souliers usés ,qui sans grâce fourmillent ,qui sans âme
dans le bruit sale de ces journées passagères m indiffère , je marche seul de la même manière que l’on marche sur les trottoirs de Paris ou de Manille.
Oui seul , toujours seul avec mes semelles de vent arpentant un asphalte figé , parfois décomposé , qui ne laissent comme unique empreinte que celle d’un long silence palliatif.
Des milliards de pas qui les un après les autres , les uns par dessus les autres , se malmènent et portent sur leurs épaules ces hommes et ces femmes , ces enfants et ces vieillards , ces personnes de toutes sortes et de toutes convenances qui laissent derrière eux ces sempiternelles traces qui inlassablement se substituent les une aux autres dans un véritable Kâma-Sûtra podo-urbain.
Des tâches de sang usagées et brunissantes, vestiges de cette fragilité humaine , qui se confondent à celles du goudron aux teintes parfois bleutées ,des hydrocarbures décolorés , des graisses épaisses et de mélasse de toutes sortes aussi pure que l’eau contaminée des égouts de Tchernobyl.
Pourtant je suis entouré , accompagné, preuve de ces cris qui m’entourent. Je suis cerné sans aucune intention de me rendre. Je suis bousculé, malmené de tous ces coudes saillants , de toutes ces épaules osseuses et parfois même rondelettes, qui frénétiquement me frôlent dans une indifférence hurlante et dont leur seule et unique contrainte ne semblerait être que la perte des ces quelques secondes vitales , aussi essentielles que des points sur un permis de conduire .
Tous accrochés à leurs smartphone à fendre les foules ,ils ne marchent plus…Ils pilotent. Il ne s’agit plus d’une lutte contre le temps mais d’une course frénétique sans aucun départ ni aucune arrivée qui à chaque seconde , à chaque dixième de seconde de perdue sonne le glas de leur bon sens emprunté.
Autrefois, dans des temps encore bien inscrits dans certaines mémoires vieillissantes, dans des temps qui appartiendront tôt ou tard aux livres d’histoires et qui eux même se retrouveront dans ces greniers poussiéreux de maisons inanimées et dont pour les plus chanceux dans les quelques vitrines d’antiquaires spécialisés du quartiers Drouot, nous prenions le temps avec cette féroce envie nécessaire de se perdre aux hasard de rencontres fortuites de toutes sortes aussi futiles qu’utiles ou inutiles que celle d’un frelon avec un ticket de métro.
Le lien ? aucun !!!!Juste que l’absurde n’avait d’importance tant que nous en avions conscience .Mais des lors que l’absurde étant devenue cette monnaie courante et nationale alors nous sommes entrés dans une évidence nécessaire qui nous permet par ce providentiel alibi de nous cacher de la perte de nos propres failles.
Celle évidence est celle de l’indifférence, cette formidable excuse qui nous évite l’aveu ,l’aveu de cette perte annoncée du raisonnement.
Peut être après tout résonner deviendrait il cette absence même de raisonnement ? A force de raison de Platon à Socrate , de Voltaire à Montesquieu ou bien de Lévy à tant d’autres en avons nous déjà fait le tour… faisant inlassablement évoluer notre monde là même où notre esprit tourne en rond comme un retour inéluctable à la case départ nous rappelant que du ventre de nos mères nous n’avions comme unique refuge ce terrible replis sur nous même.
Raisonner, se retrouver ainsi à ce même point de départ ,plutôt une bulle devrions nous dire , nous retrouver nez à nez à cette evidente métaphore de la caverne interrogerait il peut être ce fait que l’homme s’il prétend survivre doit avant tout autre chose revenir à sa place d’antan telle qu’elle le fut il y a quelques milliers d’années , c’est à dire à ce moment précis où “nous étions” plutôt que celle d’aujourd’hui ou “nous ne sommes plus”
Sublime
Bonjour,
J’ai trouvé votre texte assez intéressant sur certains points soulevés comme cette course urbaine, moderne qui engendre l’égoïsme, l’anonymat si difficile à supporter peut-être pour certains humains.
Après, faut-il retourner à notre place d’animal ? Ou l’instinct guidaient nos actes ?
Raisonner est certe un enferment sur soi, pour un temps nécessaire mais ensuite vient le temps de l’action.
Sourire aux gens dans la rue est un premier pas pour ne pas se sentir seul.
Je me permets un aparté concernant la ( grande )photo que vous postez en illustration de votre texte.
Elle m’a fait sourire car je me suis demandée si vous échangiez un texte ou si vous faisiez la promo de votre joli minoi.
J’aurai préféré un de vos tableau.
:-)
Je vous souhaite une bonne journée et merci pour ce texte qui amène à la réflexion.
Très belle caricature de notre société :)
Merci pour cette belle introduction Thierry Paul !
Nous avons hâte de découvrir vos autres textes…
Bien à vous,
ALain