Ils rament
Sous le viol des pagaies
La mer roule,
Ses hanches ondulent,
Soulèvent l’embarcation.
L’écume aux relents enivrants
Griffe les dos
Sous l’effort ahanant.
Ils rament.
Ils rament
Les cimes des palmiers
Apparaissent et plongent
A l’horizon.
Ils rament.
L’île d’eux s’éloigne.
Ils rament
Poursuivent l’île fuyarde
Ils rament
L’île au loin les regarde
En riant.
Elle a levé l’ancre l’île
Alors qu’ils pêchaient les perles;
Elle s’enfuit, l’île
Devant les pilleurs de perles;
De toute sa forêt,
Tendue comme une voile,
L’île s’est enfuie,
Guidée par les étoiles.
Soudain l’île tournoie
Sa ronde devient folle,
Dans le ciel qui rougeoie
Et l’on entend les voix
Des oiseaux affolés
Qu’emporte le maelstrom
Tourbillon emballé
Qui aspire les hommes
Dans son manège sans fin
Éternel chemin
Ils rament
L’île enfin les attend;
L’île avec ses fruits d’or
Ses fruits et son serpent;
Un serpent qui endort
Ceux qu’ils touche en tombant.
Ils rament
L’île devant eux ouvre un chemin beant
Ils rament
Ils rament
Ils rament
Et tombe le serpent.