Gageure qu’un âne nageur ? – Christian Satgé

Petite fable affable
Comme on n’attrape pas mouche avec du vinaigre
Malgré sa tête de mule, un âne voulut
Être le meilleur de sa race. Quoique maigre,
En apprenant à nager car il avait lu :
« Il faut se rendre indispensable et l’on vous aime ;
Sachez tout faire, on vous adore sans problème ! »
Il fallait donc surpasser ses pairs si balourds :
Sachant trotter, marcher, courir comme d’autres,
Il résolut d’aller à l’eau avant, un jour,
De conquérir les airs car quelque bon apôtre
Dit, matin, près de son oreille à un quidam
Que : « Rien n’est impossible ici-bas, goddam ! »
La nuit, notre équidé son idée rumine…
Ayant bon cœur et meilleur estomac encor’,
Dans une pénombre pire qu’en puits de mine,
Il s’entraîne au sol à la brasse, tête et corps
Il douche, l’eau n’étant qu’un péril en peinture,
À ses doux yeux, c’est-à-dire sans pointure…
Et puis vint cette date où il s’était promis
De se jeter à l’eau de cette rivière
Qui court près de l’asile où son maître l’a mis.
Jà, le jour grisonnait à l’horizon, fière
 L’aube allait poindre et l’aurore, tout doucement,
Ourlait de sang et d’ors la lande, tendrement.
Son courage s’évanouit avec les ombres
 De la nuit, hélas : il recule l’instant
Du saut, le moment du plongeon et ce pour nombre
De bonnes raisons : le moment, le vent, le temps,…
Sans jamais douter, bêta, de son grand courage
De ses dons pour la nage ou craindre commérages…
Un crapaud qui le voit tant et plus hésiter
Se rit de lui devinant ses peurs fort justes.
Comme il supposait ses intentions, acuité
Propre à ces bêtes : « Qu’est-ce qui te tarabuste ?
Ce qui fait vivre l’un, las, fait souvent mourir 
L’autre !… Il n’y a rien là, l’ami, qui soit injuste : 
La nature veut qu’à chaque être son élément
Comme il serait à chaque âme son aliment ! »
© Christian Satgé – décembre 2019

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Christian Satgé

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Obsédé textuel & rimeur solidaire, (af)fabuliste à césure… voire plus tard, je rêve de donner du sens aux sons comme des sons aux sens. « Méchant écriveur de lignes inégales », je stance, en effet et pour toute cause, à tout propos, essayant de trouver un équilibre entre "le beau", "le bon" et "le bien", en attendant la cata'strophe finale. Plus "humeuriste" qu'humoriste, pas vraiment poétiquement correct, j'ai vu le jour dans la « ville rosse » deux ans avant que Cl. Nougaro ne l'(en)chante. Après avoir roulé ma bosse plus que carrosse, je vis caché dans ce muscle frontalier de bien des lieux que l'on nomme Pyrénées où l'on ne trouve pire aîné que montagnard.

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