Ennui dans la nuit – Christian Satgé

Au chaud de ma chambre,
Au cœur de décembre,
Peu à peu, la nuit,
Ses ombres et sa suie,
Viennent à s’étendre
Caressantes, tendres.
Depuis longtemps
Je guettais « l’instant »,
Ce moment de trêve,
En suspens, où rêves,
Cauchemars,… se marient
Et font armoiries
De moments caresses,
Cent laps de tendresse,…
Vient « la » pensée,
Le souffle insensé
D’une idée nouvelle
Qui fera javelles
Des plumes endormies
Au champ à demi
Mort de mon Parnasse
Aux pléiades lasses.

L’été n’est pas mort.
Non : il bouge encor’
Aux landes d’Irlande,
Aux neiges d’Islande,
Où mon cœur s’endort,
Frissonnant condor
Au pays de l’Aigle,
Rapace espiègle.
Là, le craquement
Du vent inclément,
Fait frémir les branches
Nues qui flanchent :
Est-ce ration
D’inspiration
Que j’attends, réclame
Du fond de mon âme ?
La lune est fâchée,
Aux nues attachée.
Au mur, sans fin, passent
Mille heures crasses,
Sans grâce, sans mots,
Pour panser mes maux…

Drapée en sa brume
Et nimbée d’écume
Ma plume posée,
De vers reposée,
Se tait. Point d’errance,
De désespérance
– Vouloirs de velours,
Devoirs de toujours –
Ni de doux délire
À muser en lyre.
Mon encre, assagie,
Joue à l’« Ici-gît »,
Fige l’écritoire
Dans des crocs d’ivoire
Loin des horizons,
Papiers grisons,
Où pépient des phrases
Qui jazzent et jasent
Venues de ces songes
Que le sommeil ronge,
Brisant leurs échos,
Cahots en chaos.

Ce soir, pas un pas.
Je n’écrirai pas.
Mon destin m’ignore,
Rien ne phosphore
En mon esprit lourd ;
Et sous mes doigts gourds
Muets comme carpe
En quête de harpe,
Rien, las, ne court.
Et point de secours
Hélas, à attendre
Ni de lueurs tendres
Pour, là, espérer
Pouvoir opérer.
L’infini se ferme.
En frémit mon derme.
Alors je me tais,
Toute flamme ôtée
En mon cœur. Silence.
Tout d’insolence,
Vaincu et trahi,
Le noir m’envahit.

© Christian Satgé – décembre 2019

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Christian Satgé

Christian Satgé (834)

Obsédé textuel & rimeur solidaire, (af)fabuliste à césure… voire plus tard, je rêve de donner du sens aux sons comme des sons aux sens. « Méchant écriveur de lignes inégales », je stance, en effet et pour toute cause, à tout propos, essayant de trouver un équilibre entre "le beau", "le bon" et "le bien", en attendant la cata'strophe finale. Plus "humeuriste" qu'humoriste, pas vraiment poétiquement correct, j'ai vu le jour dans la « ville rosse » deux ans avant que Cl. Nougaro ne l'(en)chante. Après avoir roulé ma bosse plus que carrosse, je vis caché dans ce muscle frontalier de bien des lieux que l'on nomme Pyrénées où l'on ne trouve pire aîné que montagnard.

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4 Commentaires
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Anne Cailloux
Membre
20 janvier 2020 13 h 58 min

Mince, par le biais de tes mots, je me suis glissée à tes cotés. les images ont pris possession dans mon imagination..
Cet univers vous va très bien. J’aime beaucoup
Anne

OberLenon
OberLenon
Invité
18 janvier 2020 17 h 11 min

J’aime bien cet univers, l’ambiance posée. Une réussite