Ce tout jeune berger,
Sept ou huit ans pas plus,
Devait seul s’occuper
D’une vache “Puce”.
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Pour son morceau de pain,
A la confiture,
Il venait le matin,
Se tenant vers le mur.
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Il me semblait chétif
En djellaba trouée,
Il n’était pas craintif
Et allait le prouver.
.
Il fallait connaître
La façon de mener
La vache paître,
S’en allant promener.
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Je me suis demandée,
Paître, où, quoi, comment ?
Dans ce bled pelé
Où s’amusait le vent.
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Au sujet du gamin
Qui avait mon âge,
“Donnez avec le pain
Un bout de fromage,
.
La viande même
Serait la bienvenue,
Il a de la peine,
La vache est têtue !”
.
De quoi te mêles-tu ?
Ce sont nos affaires
As-tu bien entendu,
N’as-tu rien à faire ?”.
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Il y avait aussi
Un grand diable maigre,
Qui revenait ici
Suivi d’une chèvre.
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Les gens le disaient fou,
Il vendait quelques oeufs
Venant d’on ne sait où,
C’était un malheureux.
.
Remontant ses habits,
Il déposait ses oeufs,
Les vendant accroupi,
Nous étions curieux.
.
Après marchandage
Pendant trois quarts d’heure,
Nous n’étions plus sages
Et partions ailleurs.
.
Mais ce soit-disant fou
Sachant très bien compter
Avec ses quelques sous,
Semblait désappointé.
.
Avait-il son compte ?
Je voudrais le jurer,
Ce serait la honte
De voir me parjurer.
.
Ce fier petit berger,
Ce grand diable pâlot,
Ont fait que partager
A été mon Credo.
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(Maroc des années 50)
©Simone Gibert – 23/10/2018
Je vous remercie beaucoup Delloly !