Les avoinées de l’âne – Christian Satgé

Petite fable affable

 
L’âne d’un colporteur, plus têtu qu’une mule,

Se fait tancer et disputer

Par son maître, excédé, comme dit la formule.

Moins active qu’un député,

Voleuse et sournoise, plus que le vendeur même,

Cette graine était « de pendu »,

N’obéissant aux ordres jamais qu’au cinquième.

Chaque jour, il chapitrait

Ce mauvais compagnon, gras comme un chanoine,

Là menaçait de le cloîtrer,

Le sermonnait ici, lui flagellait la couenne,…

Mais, las, jamais rien n’y faisait :

Sans fin, il l’interpelle et toujours le querelle,

Sans guère d’amélioration ;

Il le menace s’il traînasse sous la grêle,

L’autre ignore la sommation ;

Il le réprimande tout bas pour qu’il s’amende

L’âne, fin, feint le repentir ;

Il le houspille s’il roupille, le gourmande

Quand ce gourmand, à s’abrutir,

Pille les haies, les champs qu’ils longent sur leur route,

Oui, il l’ignore à chaque fois !

S’il a dressé cet âne c’est contre lui, sans doute,

Tant l’autre est de mauvaise foi

Et pis, de plus mauvais vouloir, à chaque étape.

Qu’il proteste, l’air agressif,

Ou insinue, l’œil vers les nues : quand il l’attrape

L’autre se fait sourd et passif.

Cette anecdote-ci, qui n’a rien d’historique,

Nous montre qu’à vouloir vraiment

Laver la tête drue d’une sale bourrique,

On perd sa lessive,… et comment !

© Christian Satgé –  décembre 2012

 

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Christian Satgé

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Obsédé textuel & rimeur solidaire, (af)fabuliste à césure… voire plus tard, je rêve de donner du sens aux sons comme des sons aux sens. « Méchant écriveur de lignes inégales », je stance, en effet et pour toute cause, à tout propos, essayant de trouver un équilibre entre "le beau", "le bon" et "le bien", en attendant la cata'strophe finale. Plus "humeuriste" qu'humoriste, pas vraiment poétiquement correct, j'ai vu le jour dans la « ville rosse » deux ans avant que Cl. Nougaro ne l'(en)chante. Après avoir roulé ma bosse plus que carrosse, je vis caché dans ce muscle frontalier de bien des lieux que l'on nomme Pyrénées où l'on ne trouve pire aîné que montagnard.

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Anne Cailloux
Membre
8 février 2018 22 h 32 min

Moi, je dirais vive l’âne et son mauvais caractère..
Anne